Il y a quelques semaines, sur l'excellent site -on ne le dira jamais assez!- Autisme infantile, j'ai lu un article suivi d'un intéressant débat sur les frères et soeurs des enfants autistes.
Je m'étais alors fait la réflexion que nous avions beaucoup de chance, qu'Agathe -de presque 5 ans la cadette de Matthieu- était une petite fille gaie, enjouée, souriante, qui, en chantant, dansant, riant et intégrant Matthieu à ses jeux de faire-semblant, contribuait beaucoup à ses progrès. Certes, je constatais quotidiennement à quel point elle percevait finement les traits autistiques de Matthieu et je m'inquiétais un peu de la voir réagir si vite quand elle me sentait attristée à causes des petites régressions de son frère. Il y a quelques jours, par exemple, face à un moment de désarroi que je peinais à dissimuler, elle est spontanément venue m'embrasser en disant : "Ne t'inquiète pas, maman, Matthieu t'aime". Elle n'a que trois ans ! Et ce genre de réflexion n'a rien d'inhabituel... Dès que Matthieu pleure, elle court chercher le doudou de son grand frère pour le consoler. Et elle agit ainsi, avec beaucoup de sollicitude, avec tous les membres de son entourage.
A en croire ma psy et la pédopsy de Matthieu, je ne devais pas m'alarmer : Agathe développait des qualités d'empathie qui forgeaient sa personnalité et feraient d'elle, plus tard, une personne attentive aux autres. C'était son histoire.
Bref tout allait bien. En observant sa soeur, Matthieu progressait et Agathe était une adorable petite fille très attentionnée. Le problème, c'est qu'Agathe elle aussi observait son frère. Or elle est à l'âge où l'on imite les enfants plus âgés... Je n'avais rien vu venir à la maison mais depuis la rentrée de vacances de février, Agathe se comportait de manière inquiétante à l'école. Elle était devenue intolérante à l'échec, à la critique, au bruit ; elle s'isolait, pleurait pour un oui ou non, ne chantait plus... Quand la maîtresse m'a décrit ces signes alarmants, j'ai reconnu toute la palette des comportements inappropriés de Matthieu -auxquels il fallait ajouter l'évitement du contact oculaire. Non Agathe n'allait pas bien. Il était impossible qu'elle ne souffrît, d'une manière ou d'une autre, du handicap de son frère. J'étais effondrée.
Et puis Thierry et papa, plus optimistes, ont pensé qu'il suffisait de compter sur l'intelligence d'Agathe et que tout s'arrangerait en lui disant les choses telles quelles. Nous avons passé trois jours à lui expliquer que tel ou tel comportement était lié à l'autisme de Matthieu et qu'elle ne devait pas l'imiter. Nous avons marché sur des oeufs, car Matthieu nous entendait et il venait dire à soeur : "Non, Agathe, il ne faut pas m'imiter !" Quel crève-coeur ! Bien sûr qu'elle pouvait prendre exemple sur son frère ! Matthieu ne devait pas s'identifier à un mauvais exemple ! Alors nous avons valorisé les nombreuses qualités de Matthieu en montrant aux enfants qu'elles étaient exemplaires. Agathe est très fine, elle a compris et est redevenue elle-même en quelques jours. Matthieu redouble d'efforts pour contenir ses bizarreries. Il est si épatant : nous ne devons pas perdre une occasion de le lui dire.
Tout est rentré en ordre si vite ! C'est presque trop facile... Nous ne devons jamais relâcher notre vigilance... Comme aux premiers temps de la scolarisation de Matthieu, nous pouvons compter sur "maîtresse Caroline", secondée par Nathalie ; nous pouvons aussi nous fier au jugement du personnel du périscolaire qui a tant aidé Matthieu. La pédopsy de Matthieu nous aidera aussi à faire régulièrement le point sur tout cela.