Cette semaine, je continue mon stage pour me spécialiser dans l'enseignement aux élèves en situation de "handicap mental" (je n'aime pas trop cette formule).
La formatrice que nous avons eu ce matin a longtemps enseigné à des enfants autistes et psychotiques en hôpital de jour. Elle nous a raconté l'histoire d'un petit garçon autiste, qui, dès qu'il rencontrait un nouveau mot, disait avec horreur "c'est un gros mot". Matthieu a un temps eu le même genre de réflexions : "c'est quoi ce gros mot-là ?" disait-il quand il voyait un mot un peu compliqué. C'est vite passé. Il sait aujourd'hui ce qu'est un "gros mot" au sens communément admis.
La formatrice s'est rendu compte que son jeune élève autiste acceptait de recevoir un mot nouveau (de laisser ce mot faire corps avec lui) quand elle le rattachait à d'autres mots déjà connus, des mots de la même famille, des synonymes, un contexte parlant... Nous en revenons toujours aux liens et à la nécessité de comprendre.
Décortiquer les mots, en chercher la racine...est un principe pédagogique valide et même indispensable dans une classe. Cela peut aussi être une piste au quotidien -en plus des pulsations et autres scansions également utilisées par les instituteurs- pour enrichir le vocabulaire (cf. chapitre X "xylophone" de mon témoignage).
En tant qu'enseignants, nous sommes souvent tenus "d'avancer" le plus vite possible pour achever les programmes. La formatrice a attiré notre attention sur la nécessité, pourtant, de nous poser parfois pour "tricoter" des liens entre les données en les examinant tranquillement.
C'est, là encore, une pratique que nous pouvons reprendre à notre compte de parents : tricoter encore et encore des liens, construire des ponts entre les idées, entre les actions du quotidien pour enchaîner.
La formatrice a adapté sa pédagogie au fait que les autistes ont une vision des choses qui passe par les détails. Pour leur enseigner un concept, elle partait donc toujours d'un détail. C'est un peu la démarche logique utilisée en géographie (ma discipline) : on part d'une étude de cas puis on généralise.
Cette démarche relève presque du bon sens, à condition d'avoir toujours bien en tête le mode de fonctionnement des enfants autistes. C'est pourquoi, il est si important que les enseignants soient formés ou que les parents profitent des réunions de mise en place des PPS (Projet personnalisé de scolarisation) pour leur indiquer ce genre de particularités (attention : c'est délicat car l'enseignant ne doit pas se sentir dépossédé de son rôle).
Je ne le dirai jamais assez, Matt a beaucoup de chance : sa maîtresse l'a parfaitement cerné seule. Les élèves de l'instit que j'ai entendue ce matin ont beaucoup de chance aussi.